30 millions de billes radioactives dans le foie pour lutter contre le cancer

Publié le 12/06/2015

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Une radiothérapie interne sélective

Les billes, des microsphères de résine d’un quart de l’épaisseur d’un cheveu (32 microns) sont chargées d’Yttrium-90, une substance radioactive qui agit à l’intérieur même du foie. Jusqu’à 40 fois plus intense qu’une radiothérapie conventionnelle, tout en épargnant évidemment les tissus sains. Comment ? Par un traitement mini invasif appelé radiothérapie interne sélective (Selective Internal Radiation Therapy, SIRT) qui consiste à les acheminer par le sang et directement dans les petits vaisseaux sanguins qui entourent la (ou les) tumeurs présentes au niveau du foie.

On savait déjà placer un cathéter dans l’artère hépatique et administrer ainsi par voie intra-artérielle des chimiothérapies qui pouvaient agir directement au niveau du foie. Face par exemple à un cancer hépatique primaire ou secondaire, ou à des métastases hépatiques dues à un cancer colorectal, une situation fréquente en cancérologie digestive. On estime qu’au moment du diagnostic d’un cancer colorectal, environ un quart des personnes est déjà porteuse d’une métastase hépatique.

OPERATION. Mais la technique Sirt (dite aussi radioembolisation) mise ici au point par Sirtex va plus loin en administrant directement via les SIR sphères une véritable radiothérapie de l’intérieur. La technique SIRT repose en fait sur l’anatomie même du foie et la physiologie des tumeurs. Quand il est sain, cet organe reçoit la majorité de son apport sanguin (90%) par la veine porte qui lui fournit les nutriments nécessaires et seulement 10% par l’artère hépatique. Mais quand le foie est tumoral, les tumeurs étant très avides d’oxygène, ce rapport s’inverse. En pratique, il s’agit alors, sous anesthésie locale, de réaliser au niveau de l’aine une petite incision au niveau de l’artère fémorale, comme pour une coronarographie. Ensuite, le spécialiste en radiologie interventionnelle y introduit un cathéter qu’il remonte jusqu’au foie. Une fois en place, il injecte les 30 millions de billes.

Les premiers résultats attestent d’un gain de 8 mois de survie et d’une réduction de 30% de la progression tumorale"

L’opération se déroule sur environ une heure et une scintigraphie est pratiquée en fin de procédure pour vérifier que le niveau de radioactivité est bien localisé au niveau hépatique. Les billes, localisées au niveau des petites artères du foie, celles qui alimentent les cellules tumorales en oxygène, vont pouvoir alors émettre leur rayonnement in situ, là où il y a des métastases hépatiques à détruire. Et ce pendant environ 3 semaines. « Notre essai mené avec plus de 500 patients est le premier de cette ampleur,a commenté le rapporteur de l’étude le Pr Peter Gibbs, du Royal Melbourne Hospital (Melbourne, Australie). Avec des résultats déjà très encourageants puisque les premiers résultats attestent d’un gain de 8 mois de survie et d’une réduction de 30% de la progression tumorale ». Reste évidemment à prouver que la technique aura un effet sur la survie globale des patients. Resultats en 2017.

Approuvées par la FDA et en Europe, les billes sont indiquées pour le traitement des tumeurs du foie métastatiques inopérables et en association avec une chimiothérapie et sont déjà utilisées dans près de 700 centres dans le monde et la firme australienne développe plusieurs autres études. Comme en France, Sarah, lancée par l’Assistance publique, en cours dans le cancer du foie avancé chez des patients inopérables. Elle va pour la première fois comparer l’action des billes à celle du sorafénib (Nexavar, laboratoires Bayer Health care), le traitement standard du carcinome hépatocellulaire avancé inopérable. Elle inclura plus de 400 patients et livrera ses premiers résultats en 2016.

, envoyée spéciale de Sciences et Avenir